
Lorsque Won Young a participé à Sync en Corée, il faisait face à un dilemme : il sentait qu’il devait continuer sa carrière en droit afin de soutenir sa famille, mais son cœur lui disait de développer sa pratique artistique. Depuis, avec l’aide d’une métaphore simple, il est parvenu à combiner les deux, et crée maintenant d’incroyables œuvres d’art tout en remettant en question des notions d’esthétiques en Corée du Sud et ailleurs.
Lors de notre rencontre en ligne en mai dernier, Won et moi avons discuté de l’impact de la COVID sur nos villes respectives, Séoul et Brighton. Ce n’était pas la première fois que nous nous retrouvions depuis la tenue de Sync en Corée en 2018; nous avions également collaboré à faire un profil sur l’art des personnes handicapées en Corée du Sud pour Disability Arts International en 2018.
Won a parlé du fait que des activistes avaient milité auprès du gouvernement afin que des personnes soient retirées des centres de soin lors de la pandémie. Ces actions avaient comme objectif d’assurer que les personnes handicapées aient le droit d’être soignées dans les hôpitaux comme tout le monde. C’était une incroyable réussite et un pas vers l’avant sur le plan politique en Corée du Sud.

Le droit fait partie de la vie de Won depuis plusieurs années, mais il a toujours eu envie de créer, que ce soit au théâtre, en danse ou en art performance. Won m’a rappelé ce que je lui ai demandé à Sync en 2018 : pourquoi ne peux-tu pas faire les deux? Qu’est-ce qui t’en empêche? Cette simple question lui a permis de commencer à trouver un moyen de jumeler ses deux champs d’intérêt, pour éventuellement aboutir à des prestations acclamées à Séoul en 2019.
Les œuvres parlaient d’une loi fictive – « Une loi d’amour et d’amitié » qu’il décrivait au public lors de sa performance. Won a également franchi une étape remarquable en sortant de son fauteuil roulant, une chose qu’il n’avait jamais faite en public auparavant. « J’étais inquiet à l’époque que le public me percevrait à travers ce geste comme étant une sorte de phénomène de fête foraine. »
Au contraire, l’œuvre a eu un effet viscéral puissant pour plusieurs, sans aucune trace de condescendance. Le geste de Won a été encensé par plusieurs personnes du domaine culturel et son œuvre a même été finaliste d’un prix.
Won m’a ensuite parlé des « grands pantalons » qu’il a portés pendant des années afin de prendre une forme d’apparence soi-disant normale. C’était vraiment important pour lui de paraître d’une certaine manière lorsqu’il était en public, d’un tout jeune âge et tout au cours de sa carrière juridique. Un ami et collègue artistique lui a parlé du danseur et performeur David Toole, qui a su utiliser son corps de manière audacieuse et inédite à travers sa carrière reconnue par le public.

Bien que ses plans sont actuellement en suspens, Won a tout de même confiance qu’il pourra poursuivre sa pratique, et participera à des ateliers avec le chorégraphe Adam Benjamin une fois que les restrictions seront levées et qu’il pourra voyager à l’étranger. Cela nous a amenés à parler de la métaphore qu’il avait choisie lors de sa formation à Séoul en 2018; une métaphore qui avait quelque chose à voir avec le jeu de go. Won m’a rappelé que ce n’était pas le jeu en tant que tel qui lui servait de métaphore, mais bien la pierre « ordinaire » utilisée dans le jeu.
En tant que personnes handicapées, lorsque nous sommes seules ou en privé, loin du regard des autres, sortir de son fauteuil ou se déplacer d’une manière qui nous convient ne constituent pas des gestes conscients. Toutefois, notre manière d’être en public peut être très différente, lorsque nous nous forçons à nous conformer à ce que la société juge acceptable.
Cette manière consciente de se représenter s’étend maintenant jusqu’aux espaces virtuels, et il y a un grand potentiel d’être plus flexibles et décontracté·e·s à cet égard. Voici un article à ce sujet intitulé « The Softer Edges of Online-ness ».